Accord institutionnel avec l’Union Européenne : un avantage pour la Suisse

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 Accord institutionnel avec l’Union Européenne : un avantage pour la Suisse

Article pour « Libertés neuchâteloises », 16 mars 2018, par Gérard Viatte

Le débat sur les relations de la Suisse avec l’Union Européenne s’intensifie actuellement. Il est nécessaire de le mener d’une manière objective, basée sur l’analyse de la réalité économique et politique, et non pas en partant d’a-priori dogmatiques ou de déclarations démagogiques.
Ce débat doit être développé à tous les niveaux (fédéral, cantonal, régional) et dans toutes les instances concernées publiques et privées (partis politiques, associations économiques, centres de recherche, etc). Le séminaire sur le dossier européen tenu par le PLR le 3 février à Versoix et l’annonce d’un papier de position pour l’assemblée du 23 juin au Tessin sont des exemples positifs de cette intensification du débat.

Le Canton de Neuchâtel  est particulièrement concerné par les relations avec l’Union Européenne, en tant que 3ème canton suisse en termes d’exportations par habitant, et participant de manière intensive aux processus européens de recherche, d’innovation et d’enseignement. Les relations entre le canton et les régions européennes ne sont pas seulement de nature économique, mais aussi sociale et culturelle, comme le montrent les activités de la « Maison de l’Europe transjurassienne » depuis plus de 25 ans.
Le Grand Conseil avait souligné dans sa prise de position « historique » de mai 2014, adoptée à l’unanimité, que les options pour la mise en œuvre de l’art. 121a Cst « doivent permettre de sécuriser durablement les accords bilatéraux ».
L’intensification des négociations pour un accord institutionnel et la conclusion de celui-ci contribueront à sécuriser et à développer les accords bilatéraux.

C’est pourquoi un Appel en faveur d’un accord institutionnel a été lancé en octobre 2017 par « l’Association la Suisse en Europe », créée en octobre 2014 pour promouvoir le débat sur l’avenir des relations Suisse / UE et une confrontation démocratique rigoureuse, sans a–priori et sans lien partisan. Cet Appel, déjà signé par plus de 700 personnes, est toujours ouvert à la signature (voir texte intégral sur www.appell-ase.ch et www.suisse-en-europe.ch).
L’Appel développe les arguments qui militent en faveur d’un tel accord et répond aux objections que certains soulèvent sans réel fondement. Quelques points en bref :

– L’absence d’un tel accord freine le développement des accords bilatéraux existants et bloque la conclusion de nouveaux accords bilatéraux dans des domaines essentiels pour l’économie suisse (services financiers, électricité…)

– Les accords bilatéraux existants ne comprennent pas de mécanisme satisfaisant de surveillance et de règlement des différends, hormis les comités mixtes. Les entreprises sont confrontées à des procédures longues et coûteuses en  cas de litige.

– La Confédération et les cantons n’ont pas la possibilité de participer au processus législatif de l’UE et de faire valoir les intérêts suisses à un stade précoce.

– Un accord institutionnel renforcerait la sécurité juridique et améliorerait donc la compétitivité économique de la Suisse.

–   La crainte du « juge étranger » n’est pas pertinente. Un tel accord ne remettrait en cause ni la souveraineté du peuple, ni celle du Parlement. Les litiges pourraient être résolus par des mécanismes et institutions équilibrés. L’expérience de la Suisse en matière de droit international permet d’envisager diverses formules (AELE, tribunal arbitral, etc).

En résumé, un Accord institutionnel est nécessaire pour redynamiser les relations avec l’UE, dans l’intérêt même de la Suisse sur les plans économique, juridique et politique. Les négociations, déjà bien avancées, devraient être intensifiées pour aboutir à une conclusion rapide, qui renforcerait non seulement l’économie suisse mais aussi la position politique de la Suisse en Europe.

NOTE : La publication de cet article a été retardée. Il avait été rédigé à mi-février, c’est-à-dire avant la décision du Conseil fédéral du 2 mars définissant la mandat de négociation avec l’UE et la conférence de presse de Ignazio Cassis du 5 mars. Le mandat va dans le sens préconisé dans cet article, à savoir la négociation d’un accord institutionnel, à des conditions définies, et le choix d’un tribunal arbitral comme instance juridictionnelle. Il faut maintenant œuvrer pour que cette ligne fasse l’objet d’un large soutien dans les milieux politiques et économiques et dans la société civile.

 Gérard Viatte

a. Directeur à l’OCDE
a. Conseiller spécial à la FAO

Membre du Comité  de l’Association «  La Suisse en Europe »

gerard.viatte@ubiquando.com

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