L’eau est patrimoine commun. Elle est bien vitale. Est un droit pour tous. Or cinq millions d’humains n’y ont pas droit, deux millions ne savent pas ce qu’est l’eau potable, quatre millions ne connaissent pas les toilettes. Et l’eau se privatise. L’échange marchand domine le marché. Pour beaucoup, à la Banque économique mondiale, l’eau ne serait pas un bien universel, mais un bien économique, produit de marché, porteuse d’intérêts financiers, dont le prix acceptable est le seul souci des économistes. L’évolution est d’autant plus préoccupante que si l’eau n’est pas rare, sa qualité est rare, elle est trop souvent polluée, cent fleuves du monde sont pollués, l’auto-régénération de l’eau n’est plus respectée. On ne parle plus de droit universel de l’eau, mais de produit à prix abordable, à rendement optimisé. La vie n’est plus sacrée, elle est commercialisée. L’ancienne Communauté européenne est devenue un Marché commun. L’Europe coordonne le bon fonctionnement des marchés de l’eau par l’Union du commerce qui régule. La Bourse des matières premières a ouvert le marché boursier aux transactions de l’eau. Une des conséquences sera que l’agriculture, un exemple, passera sous les prix spéculatifs de l’eau, comme le pétrole. Une autre conséquence sera que la marchandisation de l’eau conduira à l’extinction des espèces. Ce courant est montant. On assiste à une dangereuse et progressive privatisation de l’eau en Europe.
Mais les catastrophes ne sont pas inévitables, a déclaré Riccardo Petrella, auteur à Bruxelles du Manifeste mondial de l’eau, en ouverture de la Semaine de l’Europe de Neuchâtel, récemment consacrée à l’eau dans les Villes d’Europe. Une résilience s’impose. Tel est le cri d’alarme lancé à une Europe qui alterne le meilleur et le pire. Elle affiche une unité retrouvée en Ukraine et se mobilise face à la culture tyrannique de la Russie. En même temps, elle privatise l’eau à coups de décrets, elle la marchandise. Ici, elle se trompe de chemin, car l’eau n’est pas un bien économique de quelques-uns. Elle est bien commun. Elle est bien vitale.
Jacques-André TSCHOUMY
Co-fondateur et a. président de la Maison de l’Europe transjurassienne
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